Le classement de la Butte Rouge comme Site Patrimonial Remarquable par la mairie de Châtenay-Malabry est une mascarade

Pourquoi les élus du Collectif Citoyen Chatenaisien, qui demandaient le classement de la Cité-Jardin de la Butte Rouge en Site Patrimonial Remarquable, ont finalement voté contre la procédure de classement proposée par la Mairie

Sur le principe, nous saluons la démarche de lancement de classement de la Cité-Jardin de la Butte Rouge en Site Patrimonial Remarquable. Le lancement de cette démarche semble mettre fin à une longue période durant laquelle aucune démarche n’avait été engagée en faveur de la valorisation et de la protection de la Butte Rouge. Aucune démarche n’a d’ailleurs été engagée pour entretenir la Butte-Rouge et réaliser les rénovations nécessaires dans cette même période.

Dans toute la communication de la Municipalité (gazette mensuelle, …), il est sous-entendu que la majorité municipale serait à l’origine de cette démarche de protection de la Butte Rouge. Rappelons les faits : une inscription de la Cité-Jardin à « l’inventaire des sites » avait, certes, été refusée il y a 37 ans par la municipalité de gauche de l’époque. Mais dans les 36 années qui ont suivi, aucune mesure de protection de la Butte-Rouge n’a ensuite été engagée, alors que la majorité actuelle a siégé pendant un quart de siècle ! Au cours des dernières années, lorsque l’opposition a demandé cette classification, elle a toujours été refusée par l’actuelle majorité (voir article dédié « Qui donc souhaite le classement de la Cité-Jardin en Site Patrimonial Remarquable ? »).

Il semble important de rappeler ici que ce sont les associations et les collectifs citoyens locaux, mobilisés depuis des années, qui, par leurs actions de sensibilisation auprès de grandes associations et des médias, et par leurs interventions auprès des ministères concernés, ont réussi à obtenir du Ministère de la Culture qu’il impose une classification de la Cité-Jardin comme Site Patrimonial Remarquable (aussi nomme SPR).

Son lancement résonne comme l’aboutissement de cette mobilisation.

Cependant, force est de constater que la procédure de classification pour laquelle le Conseil Municipal a délibéré jeudi 25 Mars est tout à fait incomplète, et même vidée de son sens.

A la lecture des « considérant » de la délibération, il est écrit noir sur blanc sur les travaux (de destruction- reconstruction, de rénovation lourde) pourront être engagés sur plus de la moitié de la Cité-Jardins avant même que le périmètre SPR et le plan d’action associé ne soient déterminés !!

Le protocole opérationnel proposé par la Mairie pour accompagner le classement de la Butte Rouge définit un calendrier qui ne concerne que les travaux des chantiers mais nullement le calendrier de la procédure de classement. Il est contradictoire avec l’ambition d’un Site Patrimonial Remarquable à savoir protéger et préserver l’identité d’un quartier. 

Tout d’abord, ce protocole s’inscrit dans la continuité de la modification du PLU n°4, votée le 18 Mars au Conseil Territorial. Comme nous l’avions expliqué en Conseil Municipal le 17 décembre 2020, cette modification semble insuffisante dans sa capacité à protéger le patrimoine bâti de la butte rouge, dans ses exigences en termes d’environnement, dans ses engagements pour s’inscrire dans une transition écologique réelle et non de façade, et dans sa capacité à préserver les habitants chatenaisiens les plus démunis d’une relégation loin de Chatenay-Malabry, aux périphéries de l’île de France.

Ensuite, il nous semble aller à contrecourant du bon sens, puisqu’il veut engager, sans attendre l’approbation du classement en SPR, les travaux des ilots tests, et ceux du périmètre ANRU (voir carte ci-dessous).

Le périmètre ANRU représente environ 50 % des logements de la Cité-Jardin !!! Puisqu’on y autorise le commencement des travaux sans attendre le classement SPR, dès lors que les travaux auront commencé, que restera-t-il à classer et protéger ? 

 Quant aux ilots tests, pour rappel, la programmation est la suivante :

  • 3 ensembles bâtis seraient réhabilités sur les 20 ensembles qui composent ces ilots tests (donc 15%)
  • 3 ensembles bâtis feraient l’objet d’une « rénovation lourde » sur les 20 ensembles (15%)
  • Le reste des 20 ensembles bâtis seraient démolis avec ou sans reconstruction (soit 70%)

On peut donc s’interroger sur ce qu’il restera à classer sur ces sites.

L’organisation de ces ilots tests est par ailleurs totalement fallacieuse et dévoyée. Ils sont justifiés par la Mairie avec l’argument suivant : ils seraient nécessaires à l’élaboration d’un mémoire technique, économique et environnemental apte à aiguiller correctement les futures décisions architecturales. Or, cet argument n’est vrai que pour les processus de rénovation et de réhabilitation, qui sont en effet complexes. Le procédé de déconstruction/construction neuve (qui constitue environ 70% des travaux des ilots tests) n’a aucun besoin d’être expérimenté : il est très bien connu des promoteurs !! Ces ilots tests sont donc à dessein, 3 à 4 fois plus importants que ce qu’ils devraient être.

Enfin, les tests sur l’état des bâtiments, leur structure, leurs fondations, leurs possibles extensions et surélévations en vue d’une réhabilitation ou rénovation…, ces tests auraient dû être menés plus tôt, de façon fine et ponctuelle, afin d’aiguiller la modification du PLU elle-même.

On fait donc, encore une fois, les choses dans le désordre pour torpiller un véritable classement SPR.

Une démarche logique et sincère consisterait à mener l’élaboration d’un classement SPR dans un premier temps, puis de procéder à la rénovation de la butte rouge en accord avec ses conclusions.

Le temps du classement permettrait de mener immédiatement les travaux d’entretiens palliatifs dans les logements les plus insalubres et sur lesquels, jusqu’à nouvel ordre aucune mesure n’a encore été prise.

Le projet de délibération qui nous est présenté n’est donc qu’une démarche d’affichage qui, ne permettra pas de préserver le patrimoine social, environnemental et architectural de la Butte-Rouge.

Etant évidemment en faveur d’une procédure qualitative de classement en SPR, nous avons soumis au Conseil Municipal les amendements suivants au projet de délibération :

  • Nous avons demandé que soit supprimé le paragraphe « CONSIDÉRANT que les îlots test sont engagés sans attendre l’approbation du site patrimonial remarquable et qu’il en sera de même pour les secteurs du périmètre NPNRU »
  • Nous avons demandé qu’apparaisse au sein du projet de délibération le calendrier détaillé des différentes étapes de la procédure de classification en SPR, indiquant les dates et les échéances : de l’analyse préalable, de la rédaction du cahier des charges, appel d’offres, études et passage devant la commission de patrimoine (CNPA) pour validation du périmètre, l’enquête publique et décision de classement par la ministre de la Culture. Nous demandons que la procédure de classification en SPR soit engagée dès à présent et qu’elle puisse ainsi aboutir à la stabilisation d’un périmètre et à la sélection du type de plan associé d’ici la fin de l’année 2021.
  • Nous avons demandé que soit retiré la mention du PVAP. Effectivement, le type de plan associé à la démarche de classification en SPR ne peut être approuvé qu’à l’issue de la stabilisation du périmètre, de l’enquête publique et du passage en commission nationale (il pourrait s’agir à l’issue d’un protocole PSMV)
  • Nous avons demandé qu’aucune destruction ne puisse être lancée sur la Cité-Jardin, y compris sur les ilots tests, avant que le périmètre définitif du SPR n’ait été validé en commission du patrimoine et que l’enquête publique n’ait eu lieu, dans un souci démocratique évident.

La majorité municipale ayant voté contre ces amendements, les élus de l’opposition ont été placés dans l’obligation de voter contre la délibération lançant cette mascarade de classement SPR.

Quel sens cela a-t-il de déclarer vouloir protéger des éléments mais de tout faire pour que la moitié d’entre eux soient déjà détruits lorsque la protection s’appliquera ?

Nous le répétons, et ne cesserons pas de le dire, nous soutenons cette démarche de classification mais refusons qu’elle soit vidée de son sens et qu’elle ne soit pas prise en compte en amont des projets de destructions et de la détermination du périmètre ANRU.