Finances de la ville : une dette communale en béton

Chatenay-Malabry est une des rares villes dont le fonctionnement récurrent ne génère pas suffisamment d’excédent pour rembourser la dette. Ce signe de mauvaise gestion perdure depuis au moins 2012.

Pour une raison simple : notre ville est endettée au-dessus de ses moyens, c’est l’une des communes de France dont la dette par habitant est la plus forte.

Pour néanmoins rembourser ses dettes et investir encore un peu, la mairie construit massivement pour augmenter les rentrées fiscales de la taxe foncière, et vend les bijoux de famille (terrain de l’Ecole Centrale, cour de l’école Jean Jaurès, espace vert de Robinson, etc), sacrifiant notre qualité de vie et notre capacité à supporter les futurs chocs climatiques.

Enfin, une partie des emprunts de la ville sont toujours des emprunts dits « toxiques », dont le montant des intérêts peut soudainement exploser selon les circonstances internationales.

Cette analyse a été présentée par les élus du CCC en Conseil Municipal le 27 Janvier 2022, lors du débat d’orientation budgétaire.

L’Observatoire des Finances et de la Gestion Publique Locales est un site gouvernemental qui stocke les comptes annuels des différentes communes de France depuis 2012, calcule leurs indicateurs de (bonne ou mauvaise) gestion, et permet à tout citoyen de les consulter et de comparer les communes entre elles (https://data.ofgl.fr/pages/accueil/).

Nous avons analysé les comptes de Chatenay-Malabry et, à titre d’exemple, nous les avons comparés à ceux d’une de nos villes voisines, Antony. Notons que la comparaison aurait donné des résultats similaires avec la plupart des autres communes environnantes.

Regardons l’épargne brute (Recettes – Dépenses de fonctionnement) :

Un ratio de gestion « normal », selon les bonnes pratiques, est d’au moins 10% du total des recettes.

Voilà (document 1) le graphe de l’épargne brute de Chatenay-Malabry de 2012 à 2020 : le budget de fonctionnement annuel de la ville étant d’environ 45 M€, on voit que la meilleure année, 2020, n’atteint pas ces 10%, et c’était encore pire les années précédentes (à l’exception de l’année où la commune a touché les 22 M€ provenant de la vente du terrain de l’ancienne Ecole Centrale pour y créer le nouveau quartier LaVallée). Il faut savoir que de nouveau l’épargne brute chute en 2021. Chatenay-Malabry a une épargne brute structurellement trop faible.

A titre de comparaison, l’épargne brute d’Antony, dont le budget de fonctionnement annuel est d’environ 90 M€, est constamment à environ 15% (document 2).

Regardons maintenant l’épargne nette, qui est ce qui reste quand on enlève à l’épargne brute le remboursement du capital de la dette :

Un ratio « normal », selon les bonnes pratiques, est d’être a minima positif, c’est-à-dire que le fonctionnement récurrent génère suffisamment d’excédent pour faire face à l’échéance des remboursements d’emprunts. C’est une simple règle de gestion en « bon père de famille ».

Voilà (document 3) le graphe de l’épargne nette de Chatenay-Malabry de 2012 à 2020 : elle a toujours été négative (à l’exception de l’année où nous avons touché les 22 M€ de l’opération LaVallée).

A titre de comparaison, l’épargne nette d’Antony est constamment positive de plusieurs M€ (document 4).

On voit donc que le fonctionnement « normal », récurrent, de notre commune ne lui permet pas d’honorer ses emprunts. Peut-être que notre commune peut mieux optimiser ses recettes et ses dépenses de fonctionnement. Mais ce que cela montre surtout, c’est que notre commune est beaucoup trop endettée : elle a contracté des emprunts au dessus de ses moyens.

Voilà (document 5) le graphe du capital qui reste à rembourser par Chatenay-Malabry, et le même graphe pour Antony (document 6) : l’encours d’emprunt d’Antony est environ 30% supérieur à celui de Chatenay, pour un budget 2 fois plus important, donc en proportion l’endettement de Chatenay est 1,5 fois celui d’Antony.

Il faut rappeler que Chatenay-Malabry était, encore récemment, la 11ème ville de France avec la plus forte dette par habitant, sur 36 000 communes …Vingt ans de gestion par l’actuelle majorité l’ont amenée plusieurs années dans les 10 communes les plus endettées de France dans sa catégorie de population. Et il faudra encore plus de 15 ans pour rembourser l’intégralité des emprunts pesant sur notre ville.

En conclusion, l’épargne nette sera donc négative de plusieurs millions d’euros cette année, ce qui a un impact très négatif sur notre capacité d’investissement.

Comment donc notre ville réussit-elle néanmoins à faire face à ses échéances d’emprunt, et à investir encore un peu ?

Deux mécanismes sont utilisés :

  • Le premier consiste à densifier massivement pour augmenter les rentrées fiscales de la taxe foncière.
  • Le second mécanisme consiste à vendre les bijoux de famille. Sans ces apports au budget, la ville serait encore obligée de s’endetter pour investir, ce qui lui serait probablement refusé. Après les 22 millions perçus lors de l’opération sur le terrain de l’école Centrale, la vente de la cour de l’école Jean Jaurés va rapporter 10 millions. Et nous ne parlons pas de la vente du square Robinson ni de l’opération à venir sur la faculté de pharmacie.

La trésorerie apportée par l’opération LaVallée, et le grignotage de cette cagnotte année après année pour rembourser nos emprunts se visualise aisément sur ce graphe de la trésorerie de notre ville (document 7).

Globalement notre ville est donc engagée, pour rembourser ses emprunts, dans une politique agressive de vente du foncier public et de densification urbaine qui, sous prétexte de dynamisme budgétaire, affecte négativement la qualité de vie des habitants, et diminuent notre résilience environnementale et climatique, c’est-à-dire notre capacité à supporter les futures canicules et vagues de fortes chaleur.

Cette politique permettra-t-elle de sortir notre ville de la spirale du surendettement ? Rien n’est moins sur. Cette fuite en avant pourrait n’être qu’un cercle vicieux, car cette densification a des coûts induits importants en termes de fonctionnement et d’équipement.

La ville vend des terrains pour construire afin d’obtenir à court terme les entrées d’argent exceptionnelles liées à ces ventes, et les recettes fiscales de taxes foncières, mais cela génère de nouveaux investissements à financer, et de nouvelles dépenses de fonctionnement à long terme.

Nous avons des raisons de penser que ces coûts induits sont inquiétants :  

  • Les prochains investissements sont exclusivement destinés à augmenter la capacité d’accueil scolaire de la ville (Cuisine centrale, groupe scolaire LaVallée, crèche LaVallée, crèche du Pavillon Colbert).
  • Les charges de personnel vont augmenter fortement avec le nombre de nouveaux habitants apportés par les programmes immobiliers et avec le rajeunissement démographique, qui vont considérablement augmenter les effectifs nécessaires dans les écoles et les crèches.

Les dépenses d’investissement et l’inflation des dépenses de personnel qui en découlent remettent clairement en cause la pertinence de cette politique de densification.

Ces coûts futurs sont mal documentés. Dans le dossier budgétaire remis par la mairie au Conseil Municipal, aucun détail prospectif ni aucune simulation future ne sont fournis sur l’évolution attendue dans les années à venir, en particulier lors de la livraison de LaVallée. Des projections de surcout de fonctionnement et d’investissements manquent et devraient être fournies en face des projections de recettes fiscales supplémentaires pour que l’on comprenne si tout cela fait du sens sur le plan économique. Ces informations seraient bienvenues afin de donner un peu de profondeur prospective à nos Débats d’Orientation Budgétaire.

Notons en tout cas que notre capacité d’investissement limitée, combinée à la nécessité de réaliser des investissements liés à la densification, empêche la ville de réaliser des investissements innovants, apportant une qualité de vie supplémentaire, ou l’engageant vers une réelle transition écologique.

Un exemple qui en dit long est celui du projet emblématique d’équiper notre ville d’un réseau de chaleur urbain alimenté par géothermie : la majorité a décidé de confier l’intégralité du projet de géothermie au privé sans y investir le moindre euro. Là où d’autres communes ont réussi à déployer un projet de géothermie réussi en maitrisant le cout pour l’usager par une gouvernance et un financement publics, Chatenay-Malabry prend le risque de voir les prix s’envoler pour ses habitants.

Rappelons enfin que les finances publiques de Chatenay-Malabry ont une épée de Damoclès au-dessus de leur tête :

Encore plusieurs millions d’emprunts dit « toxiques », qui peuvent encore se retourner contre nous : le montant des intérêts peut soudainement exploser selon les circonstances internationales. Or, en ce moment, les circonstances internationales sont pour le moins instables …

La gestion de la majorité municipale actuelle nous a donc amené à une situation financière fragile et risquée, et au déluge de constructions qui s’abat sur Chatenay, dont nous ne venons de voir qu’il n’est motivé que par le fait de devoir faire face aux échéances de remboursements d’emprunt.

C’est une preuve supplémentaire, s’il en est besoin, que ce déluge ne répond pas à la nécessité de combler le manque de logements, contrairement à ce que notre maire affirme régulièrement.

En effet, aucune instance n’impose à Chatenay Malabry de construire autant de nouveaux logements. Surtout pas la région Ile de France ni la métropole du Grand Paris, dont la dernière tentative pour définir le nombre de logements à construire prévoyait pour Chatenay -Malabry un objectif de 150 logements par an. (voir le projet de PMHH – Plan Métropolitain de l’Habitat et de l’Hébergement)

Avec LaVallée, la ville en prévoit 2200 en 5 ans, soit déjà 3 fois l’objectif régional envisagé !!! Et il faudrait y ajouter toutes les autres résidences actuellement en cours de construction dans la ville, et les 1000 logements supplémentaires prévus à La Butte Rouge.

Enfin, il nous faut également dénoncer les conséquences de la situation financière de notre ville sur le volet social.

Nous notons (avec satisfaction) que la reconstruction du centre social semble devoir être prochainement financée par le département. Nous rappelons que ce projet est promis par la majorité municipale depuis deux mandatures (12 ans !).

Nous notons également que le dispositif de péréquation de solidarité entre communes prend plus à Chatenay qu’il ne lui apporte. C’est bien la preuve que Châtenay-Malabry n’est pas dans une situation particulièrement difficile du point de vue social et du revenu de ses habitants, en comparaison d’autres communes françaises. Comme nous ne cessons de le répéter, la répartition des revenus à Châtenay Malabry reflète la distribution moyenne en Ile de France.

Chatenay n’a donc aucune raison légitime de vouloir supprimer 1500 logements sociaux à la Butte Rouge.

Ce désastre social n’est pas motivé par un nécessaire rééquilibrage socio-économique de la ville, mais par une nième déclinaison de la fuite en avant financière qui consiste à vendre des terrains et multiplier les sources de taxe foncière pour pouvoir rembourser ses emprunts et investir encore un peu. Châtenay doit donc préserver l’ensemble de son habitat social.